“Praise of Meaning” : Tauceti sort un deuxième EP subversif et percutant

Après un premier EP, Weapons 002, sorti l’année dernière sur Raise Records, la Grenobloise enchaine avec Praise of Meaning et vient largement confirmer son statut de nouvel espoir de la scène techno.

Nouvelle résidente du Sucre à Lyon, Tauceti propose une techno résolument mentale et poursuit un seul et unique but : nous faire décoller. Avec une précision d’orfèvre, l’artiste joue avec les sons, les ambiances, les textures, jusqu’à nous envelopper totalement, loin des bangers à 160bpm largement entendus dans les clubs et en warehouse. Une invitation à l’introspection que l’artiste poursuit avec son dernier EP, Praise of Meaning, sorti sur le label 30D Records. Avant son deuxième passage au Rex Club le week-end prochain pour la Leo Pol Curates, l’artiste revient sur la genèse de Praise of Meaning.

Quel a été le contexte de production de cet EP ? 

J’ai produit ces tracks juste avant l’annonce du dernier confinement. Les clubs avaient rouverts et dégageaient une ambiance toute particulière, qui illustrait bien ce sentiment de retour à la vie. Il y avait encore plus qu’avant une énergie folle qui se dégageait du public et des artistes. Ce n’est pas par hasard que ceux que je côtois régulièrement ont pu faire preuve d’une créativité renouvelée à ce moment-là. On vivait quelque chose d’exceptionnel.

Pour ma part, j’ai eu une grande remise en question à cette période. Sur ce que signifiait construire une carrière musicale d’abord, l’émergence artistique, sur ce que j’avais envie de dire à travers mes productions. Je voulais me lancer dans ce qui me faisait le plus vibrer : l’ambient, la doomcore et l’hardcore lent. J’avais déjà produit pas mal de tracks dans ce style mais je n’ai jamais osé les envoyer et surtout les jouer lors de mes sets. Parce qu’ils ne correspondaient pas vraiment aux canons classiques et attendus de ce qu’on peut entendre en ce moment en soirées. D’où une certaine tendance à me cantonner à un peu plus de classicisme, mais en veillant à garder cette inspiration hispanique et ces consonances texturées que j’affectionne, tout en me posant des questions sur ce processus réflexif.

Quels étaient tes objectifs ?

À la suite de ces interrogations, je me suis dit qu’il fallait que j’ose. J’avais envie de produire quelque chose de beaucoup plus personnel et intime (et ça sera le cas pour mes prochaines sorties aussi). Je voulais aussi montrer au public une autre facette de ma personnalité. En effet, j’ai toujours été pudique sur mes sentiments et mes émotions, et cela se retranscrit sur l’image que je renvoie publiquement sur les réseaux et en club. J’ai compris en fait que produire de la musique est une façon toute trouvée pour pouvoir parler de soi.

Je voulais volontairement et radicalement m’éloigner de ce qu’on peut communément entendre (comme ces EP techno faits quasiment que de bangers). Cet EP avait aussi et surtout pour but de raconter une histoire avec un fil narratif bien établi, où il y ait un jeu de réponses successives entre les tracks. Commencer et finir par de l’ambient permet ainsi d’établir un prologue et un épilogue à tout ça. A travers cet EP, je voulais raconter quelque chose en lien avec les enjeux contemporains auxquels nous sommes confrontés : des sociétés en mouvement mais qui, parfois, se confrontent ou sont en rupture avec ce qui se faisait avant, et un certain esprit de résilience.

Quel processus créatif as-tu suivi ?

J’ai été particulièrement attentive à donner corps à ma musique, avec ces jeux de textures qui sont toujours présents dans chacun des tracks. Ils permettent de mettre en place ce continuum narratif que j’évoquais précédemment, afin d’établir une suite logique à leur écoute. Tout cela dans le but d’accompagner les personnes qui l’écouteront et les laisser ensuite libre à toute interprétation et interrogation.

Si tu devais décrire cet EP en trois mots ?

Intime, menaçant, et marginal.